Biopic

28 octobre 20244 minutes

De l’anglais des États-Unis nous est venu récemment le nom biopic, mot valise composé à l’aide de bio(graphical) pic(ture), « film biographique ».

Le cinéma a très vite pris comme sujet de films la vie de personnes illustres. On pouvait ainsi parler du Napoléon d’Abel Gance ou du Casanova d’Alexandre Volkoff.

Le film biographique s’avère un genre prisé par le public et correspond à des valeurs éducatives, historiques et culturelles.

Il s’agit de montrer à l’aide d’une caméra la vie d’un personnage réel. Certes celle-ci peut être romancée ou caricaturée mais jusqu’à un certain point, jamais il ne devrait s’y mêler une fiction ; en effet le biopic se situe hors du sujet littéraire. La vraisemblance ne se veut pas une vérité, le découpage d’un scénario permet de faire la part de la réalité.

L’exercice du biopic est d’une grande difficulté : entre tentation d’exhaustivité, choix difficile sur la période et les sujets à aborder et regard forcément subjectif…

La qualité éducative du biopic reste fondamentale grâce à l’impact intellectuel, la pédagogie, la notion d’exemplarité, l’instruction civique que celui-ci diffuse en particulier à la jeunesse. Rappelons ici le grand rôle des ciné-clubs, du cinéma ambulant qui permettaient entre 1935 et 1960 de diffuser dans les écoles, les lycées, les villages, nombre de films consacrés pêlemêle à des Grands hommes tels Pasteur, Zola, Lincoln, Juarez, Garibaldi etc. C’est dans ces années-là que sort le fameux Napoléon Bonaparte de Abel Gance, une révolution cinématographique, un biopic exalté. Plus discrètement, Le Docteur Laennec (M. Cloche, 1948) évoque l’invention du stéthoscope en 1810 alors que la tuberculose sévit en Europe. Mais des dérapages sont possibles comme l'acte de propagande par le biais d’un biopic monumental, Scipion l’Africain (1937, C. Gallone) consacré à ce général mussolinien !…

Tour à tour, les sportifs, les artistes, les politiciens intéressent un public friand d’exploits, de réussites sociales.

Dans l'un des articles que j'ai consulté : trois chefs d’œuvre, alliant le talent du cinéaste, la grandeur du sujet et la qualité esthétique sont mis en avant :

En 1962, Lawrence d’Arabie de David Lean non seulement description des actes héroïques en 1946 d’un célèbre aventurier mais avec l’aspect philosophique et poétique au centre d’un conflit tragique où s’opposent l’amertume et la volonté de ce colonel Lawrence qui croyait à l’indépendance des États arabes.

Trois ans plus tard, Andrei Tarkovski réalise Andreï Roublev, une œuvre d’une exceptionnelle hauteur spirituelle consacrée à un peintre d’icônes du XVe siècle, hostile à l’Église dogmatique et répressive qui choisit de se taire plutôt que d’abandonner ses convictions et d’adhérer à une idéologie qu’il récuse. Ce film tourné en 1966 en URSS, cristallisait alors le génie humain face à l’imposture.

Dans une autre œuvre magnifique Amadeus (1984), Milos Forman réussit le prodige d’associer la créativité musicale à une biographie complète de Mozart tout en étudiant son comportement social et humaniste.

Par la suite, au-delà des années 2000, la vogue des biopics reprenait, n’hésitant pas à aborder des héros contemporains plus ou moins crédibles mais néanmoins célébrés. Cette vogue étant amplifiée par la pénurie de bons scénarios !

Entre culte de la célébrité et sentiment de nostalgie, l’attrait pour les biopics est de plus en plus fort. Si le genre met en lumière des récits poignants, il peut aussi verser dans le sensationnalisme gênant.

Ces dernières années, le nombre de biopics a explosé. En témoigne les sorties récentes des films Oppenheimer, Maestro ou encore Priscilla.

S’il a toujours existé, sa forme et sa perception ont évolué au fil du temps. D’abord travaillé comme de grandes fresques historiques épiques et peu nuancées, les biopics ont commencé à développer des portraits plus incisifs, concentrés et subtiles à partir de la moitié des années 2000, avant de s’orienter de plus en plus vers les récits de personnes encore en vie (The social Network, Rocketman…), à mesure que le culte de la célébrité s’est densifié.

Un genre fragile

Nombre de biopics sont considérés comme de véritables navets. Pour Yannis Tzioumakis, auteur de American Independent Cinema, interviewé par la BBC, c’est la teneur sérieuse et solennelle, voire prestigieuse, de ce genre qui le rend si fragile. Par sa nature, il invite le spectateur à assister à un bout d’Histoire. Dans ce cadre, la moindre erreur prend des proportions immenses et invite à la moquerie.

Incarner une figure populaire connue de tous ou à laquelle le public a facilement accès constitue un challenge important. L’interprétation (voix, accent, mimiques), mais aussi le travail d’habillage et de maquillage (prothèses…) est fatalement sujet à comparaison, à l’heure où les ressources (interviews, lives, biographies…) sont accessibles. Les prestations réussies sont donc plus identifiables, tout comme les faux pas qui sont soulignés et critiqués massivement.

Quelques liens vers les biopics récents que j'ai regardé et mis dans mon blog :

  1. cinéma

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